mercredi 30 mars 2011

Les béruriers sont les rois

      Parmi les bands qui ont marqué mon adolescence, Bérurier Noir est sans aucun doute celui qui occupe la plus grande place.  Mon premier contact avec eux s'est produit lorsque j'avais 14 ou 15 ans chez mon ami François; son frère étudiait à l'extérieur et c'est lui qui a ramené cette cassette qui allait changer mon univers musical à tout jamais.  On ne peut toutefois pas parler d'un coup de foudre, je n'ai pas accroché à la première écoute.  C'est peut-être dû à Dédé, la boîte à rythme au son étrange qui tenait place de batterie,  ou encore à la guitare à 2 accords de Loran, ou parce que c'était en français, chose plutôt inhabituelle à mes oreilles qui découvraient à cette époque le punk et le hardcore. Peu importe, le mal était fait.

      Si je me souviens bien, la cassette contenait "Abracadaboum" et "Concerto pour détraqués", leurs 2 meilleurs albums selon moi.  Rapidement, la cassette joue en boucle dans mon "ghettoblaster" ( c'est les années 80 quand même!) et en plus des Bérus, on commence aussi à connaître Ludwig Von 88, LSD, Les Porte-Mentaux, les Garçons Bouchers, etc.  On peut faire de la musique qui rentre dedans en français: une véritable révélation!  Un peu comme les Ramones l'ont fait dans les années 70, les Bérus font réaliser à plein de jeunes qu'on a pas besoin d'être virtuose pour former un band; 2 accords, des cheveux tout croches et un sentiment de révolte font amplement l'affaire.  Partout au Québec, des groupes voient le jour et chantent dans la langue de Johnny Haliday; au tournant des années 90, une scène punk francophone prend forme, et pas seulement à Québec ou Montréal. 

     Revenons aux Bérus.  À l'automne 1989, le groupe a déjà annoncé sa dissolution et visite le Québec pour une tournée d'adieu de 6 concerts, dont le premier à Rimouski, à une heure de chez-nous!  C'est un véritable rassemblement de toute la jeunesse rebelle de la région.  Le concert a lieu à la Coudée du Cégep, le 6 octobre, devant une salle comble; il y a du monde jusqu'à la porte!  On ne s'embarasse pas d'une première partie, de toute façon, aucun band n'aurait pu nous faire patienter!  Je crois que rien n'aurait pu nous préparer à ce que nous allions vivre ce soir-là: nous étions tous des béruriers, du vrai fan punk à mohawk jusqu'au cousin de l'autre qui se retrouve là sans connaître le groupe!  J'ai des images de cracheur de flammes, de danseuse du ventre, de chinois qui fait des kata, de clown agitateur de drapeaux, mais aussi de visages béats, ivres de ces textes que nous connaissions tous par coeur.  Certains ont le poing dans les airs, d'autres agitent de petits drapeaux que les Bérus ont lancé (j'en ai un!), d'autres s'époumonnent à dénoncer le Front National, même si plusieurs ignorent probablement ce que c'est!   22 ans  et des dizaines de shows plus tard, ça reste un des meilleurs que j'ai vu, autant pour le spectacle en lui-même, que pour ce que le groupe représentait pour nous à ce moment.  Ils étaient nos porte-parole, et ce soir-là nous avons pu joindre notre voix à la leur.

      En 1991, je suis à Rimouski au bar le Sens Unique pour voir un show de Banlieue Rouge et des Krostons (qu'est-ce que je vous disais pour la scène franco!) et assis à la terrasse, j'entame la conversation avec un type que je ne connais pas.  Il m'apprend qu'il est Michel Vézina et qu'il a fait partie des Bérus!  Tabarnak!  En 1985 ou 1986, le rimouskois d'origine a quitté le Québec pour Paris avec l'intention de faire partie de la troupe des Bérus, et c'est ce qui est arrivé!  C'était lui le clown format géant!  Il m'a raconté de nombreux épisodes de son aventure de quelques années avec le plus grand groupe punk français. Passionnant!   Des histoires de véritables batailles rangées contre des néo-fascistes français, ou encore de shows mémorables dans de petits bleds perdus.  Une rencontre que je n'oublierai jamais.  Il est maintenant auteur et a publié quelques romans, en plus de fonder la maison d'éditions Coup de Tête en 2007. Il a aussi été le rédacteur en chef du journal le Mouton Noir de 2000 à 2002.

     Les Bérus sont revenus sur scène sporadiquement entre 2003 et 2006, dont un mémorable show à Québec devant 50 000 personnes dans la boue jusqu'aux mollets.  Mais ça, c'est une autre histoire.

dimanche 27 mars 2011

Pourquoi un blog?

Tout d'abord, un blog pour crier à la face du monde mon amour du beat de fou, du riff de malade et de la mélodie qui tue.  Ensuite, une façon de partager mes découvertes, expériences et points de vue sur tout ce qui touche cette passion qui me ronge depuis l'aube de mon adolescence, vers 12-13 ans.  J'ai joué dans des bands, produit des concerts, géré un groupe, collectionné les vinyles et chanté sous la douche.  J'aurais voulu être un artiste, comme disait l'autre, mais mes talents de musicien sont plutôt limités; c'est peut-être pour ça que j'ai touché à tout le reste, pour me rapprocher de l'inaccessible et du magnifique...

J'aime la musique sous toutes ses coutures, aussi bien enregistrée que live.  Pour moi, un concert réussi, c'est lorsque j'ai l'impression d'avoir vécu un moment unique, d'avoir communié à la grand messe du rock'n'roll.  J'ai vécu des moments de grâce dans des shows où il y avait 15 personnes, et j'ai été déçu entouré de 20 000 autres.  Ces instants magiques sont souvent inattendus, et les déceptions viennent en général après avoir eu des attentes élevées.  Il y a quelques années, je me suis procuré le coffret CD des Clash, "Clash on Broadway". Dans le livret, il y a un texte extrait du livre de Lester Bangs, "Psychotic reactions and carburetor dung", qui relate le séjour de Bangs en Angleterre dans les années 70, où il a accompagné les Clash en tournée.  Le dernier paragraphe résume bien des choses pour moi:

"The politics of rock'n'roll, in England or America or anywhere else, is that a while lot of kids want to be fried out of their skins by the most scalding propulsion they can find, for a night they can pretend is the rest of their lives, and wether the next day they go back to work in shops of boredom on the dole or American TV in Mom'n'Daddy's living room nothing can cancel the reality of that night in the revivifying flames when for once if only then in your life you were blasted outside of yourself and the monotony which defines most life anywhere at any time, when you supper on lightning and nothing else in the realms of the living or dead mattered at all."